lundi 4 mai 2009

la madame de la caisse

C'est le premier du mois, celui où la file à la caisse est plus longue que d'habitude, celui où tu te maudis d'avoir à passer voir un caissier parce qu'il te faut retirer un montant excédant la limite permise au guichet.

J'attends depuis trop longtemps pour ma patience élimée, les ordinateurs de la caisse populaire surchauffant leurs processeurs Pentium III depuis de trop nombreuses années pour démarrer au quart de tour LA journée du mois où y'a trop de monde.

Un guichet se libère et je m'y présente, encore riche des profits tous relatifs de la maison fraîchement vendue. "Est-ce que le chèque est dégelé? Je dois retirer 5000$..."

Le gars pianote sur le clavier, va s'enquérir des procédures pour faire dégeler l'argent en me laissant planté au comptoir. Je consulte mes courriels sur mon smart phone, incapable de vraiment prendre une couple d'heures de congé.

Une dame se présente au caissier à ma droite, tremblante, ses deux chèques gouvernementaux à la main. "je veux déposer trente piasses, payer mon compte d'hydro et le reste en argent" qu'elle dit en sortant une facture chiffonnée de son sac à main.

"Des coupures en particulier madame?" de questionner le caissier, d'un français teinté d'un accent maghrébin. "100 en 5, pis un cinq piasses en change"

Le caissier effectue les transactions et remet cent dollars en coupures de cinq à la dame. Le regard de la vieille se brouille, elle commence à trembler. "C'est pas ça que j'ai demandé! Je veux cinq cent en cent piasses, le reste en vingts pis cinq piasses en change!" Le caissier conserve son calme, malgré le cafouillage intellectuel évident de sa cliente. Il change prestement les billets pour ceux demandés, met le livret à jour et le remet à la madame, de plus en plus confuse.

"Combien que j'ai dans mon livre?" " Vous êtes dans le rouge de 126 dollars madame"...

Les yeux affollés, les tremblements qui s'amplifient, la panique qui s'installe...

"Mais...comment ça? je comprends pas!"

"vous avez déposé trente dollars, payé votre compte de 150 dollars d'hydro, le reste je vous l'ai remis..."

"Mais voyons donc!" de l'interrompre la cliente "C'est pas ça qu'ils font d'habitude! faut déposer trente piasses, payer le compte et me donner le reste!"

"Madame, c'est la première fois que je vous vois, faut me dire clairement ce que vous voulez..."

"je te l'ai dit! Je fais toujours ça..."

J'ai envie d'attendre qu'elle parte, de retirer cent dollars de plus et de demander au caissier de le déposer dans son compte...

"Madame, c'est pas grave, on va refaire les opérations, tout va être comme d'habitude"

Pendant ce temps-là, mon caissier revient, avec la confirmation que le chèque est dégelé. Il compte les trente billets de cent devant moi, ajoute les quarante-cinq billets de cinquante et l'unique vingt à la pile. "Une enveloppe monsieur?" "Oui, s'il-vous-plaît..."

Je fourre l'enveloppe pliée dans ma poche et sort de la caisse, laissant derrière la dame confuse, qui ne comprend sûrement encore rien des événements aujourd'hui, pas assez présente intellectuellement pour développer une pensée abstraite lui permettant de cerner les opérations mathématiques effectuées, budgétant à la cenne juste pour arriver.

Crisse que des fois, je me plains pour rien...

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