mercredi 2 mars 2005

Le désengagement social

Y'a quelques années, Faith Popcorn nous scandait l'avènement du coocooning, où tout un chacun s'f'rait un beau p'tit nid douillet et voudrait y passer le plus de temps possible.

On a le cinéma-maison, les divans plus grands que grands, les doudous 4 saisons, le siège de toilette chauffant, la douche à 875 jets, internet hyper haute-vitesse, 800 millions de canaux sur le câble, des frigidaires qui commandent la bouffe qui manque...

Mais y'a plus de tissu social. Les gens s'referment dans leur cocon. Parler d'esprit de communauté attire des regards plein de questions et surtout, nostalgiques.

Quand aider le voisin allait de soi...Quand le saluer n'était pas un fardeau.
Quand les familles se connaissaient, s'entraidaient.
Quand les gens n'avaient pas peur de sortir de chez eux.

Quand j'étais p'tit (il y a looooooooooongtemps! ) , je courrais à la maison une fois l'école finie. J'ouvrais la porte, je lançais mon sac à l'intérieur et je refermais aussitôt, avant que la porte aie pu cogner le mur. J'étais dehors jusqu'au souper, à jouer, souvent avec un bout de bois pis des roches. J'avais du fun et je ne m'ennuyais pas. Avec la gang du quartier, on inventait des mondes et on imaginait des histoires abracadabrantes.

Y'a pas ça aujoud'hui, ou si peu. Les jeunes sont plogués sur les consoles de jeux vidéo, sur la télé et sur le net. Les parents trouvent cela pratique: comme ça, junior ne se blessera pas, sera relativement propre et développera des habiletés motrices fines, très utiles pour un futur emploi en multimédias.

Tout ça parce que papa maman doivent travailler un nombre effarant d'heures pour combler les besoins liés au coocooning (j'viens d'avoir une image du film coocoon...touchant)

Les gens n'ont plus le temps, mais ont secrètement envie, d'avoir du temps. Où un après-midi en famille ne voudrait pas dire aller reconduire les rejetons à leurs 34 cours et activités (faut performer aujourd'hui) mais jouer au scrabble en famille, lire un livre, aller marcher dans l'bois, voir une pièce de théâtre.

De plus en plus, les gens sont catégorisés selon leur emploi et non selon ce qu'ils sont. L'importance est basée sur la capacité des gens à faire engranger des profits à leur entreprise. Belle valeur, dans les deux sens du terme. Ceux qui déploient des efforts pour se réaliser (et aider les autres à le faire) sont perçus comme des extra-terrestres. Pas que je préconise l'un ou l'autre: l'équilibre est toujours ce qu'il y a de mieux.

Faut faire attention à un truc...Remarquez les gens autour de vous...remarques les moyens qu'ils utilisent pour pallier à leurs manques. Alcool. Cigarettes. Drogue. Sexe. Jeu. Des manières de sublimer le fait qu'on est autant esclave que pendant la révolution industrielle, peut-être même plus. Au moins, les ouvriers de l'époque savaient à quoi s'attendre: une pitance de misère pour des heures de travail interminables. Maintenant, on nous dore la pilule: gym fourni, party de nowell, salaires concurrentiels, primes au rendement, mais à quel prix? On s'doit d'être totalement disponible au bien être de l'entreprise. Ceux qui refusent de faire des heures supp' (non-payées dans le pire des cas, accumulables dans le meilleur) sont vus comme des nuisances, des paresseux. La consommation excessive (dont je fais état parfois..souvent) nous pousse à travailler de plus en plus, nous faisant passer à côté de l'essentiel: nous.

pas étonnant que les gens ne pensent qu'à eux dans cette situation. Balancer quelques billets à des organismes de charité pour nous soulager la conscience, ça ne règle pas le problème, ça ne fait que le contenir.

Un lien, assez inquiétant, me saute aux yeux. Les différentes castes, le besoin de s'échapper du quotidien (souvent par des produits offerts par des régies gouvernementales), la valeur des individus basée sur leur travail, la culture comme agent de perversion, le rejet de l'éducation des enfants par les parents, la prise en charge et la standardisation de l'éducation par l'État....Serions-nous en pleines utopies négatives? Celles décrites par Huxley, Bradbury et Orwell?

Personnellement, je ne veux pas de Soma, je ne veux pas qu'on brûle mes livres et je ne veux surtout pas vivre 1984.

La société de loisirs qu'on nous promettait est à des lieues de ce que nous vivons présentement.

Réfléchir - Comprendre - Agir. C'est ce que j'vais faire.

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